Droit de réponse de Mère Marie Ferréol à la suite de l’article de La Croix du 24 juin

Droit de réponse publié dans l’édition numérique du journal la Croix du 09 août 2021. Nous en donnons ici l’intégralité:

Nommée et désignée par un article du 24 juin dernier dont je fais l’objet puisqu’il s’agit de « questions autour » du renvoi de ma communauté, je n’ai pourtant pas été contactée par La Croix. Je tiens ainsi à m’exprimer sur ces faits.

Je n’ai adressé à Rome aucun courrier l’an dernier et n’ai donc pas remis en cause le gouvernement de Mère Marie de Saint Charles, Prieure, dont j’ai toujours reconnu la légitimité de l’élection à laquelle j’ai moi-même participé en août 2019 en tant que déléguée au Chapitre Général.

J’ai vécu 34 ans au sein de ma communauté sans avoir reçu de monition, d’avertissement ou de demande de modifier tel aspect de mon comportement. Il n’a jamais été évoqué une quelconque difficulté dans mon aptitude à la vie religieuse.

A l’été 2020, lorsque les visiteurs apostoliques ont mené leur enquête, j’ai été interrogée comme toutes les autres sœurs sur les quatre points de la visite apostolique (le charisme de l’Institut, la formation des jeunes, sœurs, la vie communautaire, les écoles). Ils ne m’ont pas fait le moindre reproche et je ne les ai plus vus après jusqu’à leur départ. Fin août, j’ai reçu un questionnaire complémentaire avec des interrogations telles que : « pouvez-vous nous dire quels étaient -et sont- vos interlocuteurs à la Commission Ecclesia Dei ? Avez-vous eu connaissance de la monition de Mgr POZZO du 1er octobre 2016 sur les relations avec Rome ? » etc…

Ces questions ne constituaient en rien une accusation. Elles m’ont laissé cependant un certain malaise en raison du manque de bienveillance qui transparaissait. J’y ai répondu loyalement par une lettre manuscrite de 12 pages en date du 30 août. Il n’existe pas de lettre du 30 Août envoyée par les Visiteurs. Je n’ai en tout état de cause jamais reçu de « chef d’accusation » tel que suggéré par Dom Jean Charles Nault.

Ainsi, sans la moindre communication préalable de fautes ou de faits, ni d’avertissement de la perspective d’un renvoi, j’ai été renvoyée de ma communauté en octobre 2020, ce qui est contraire aux canons 1341 et 1720.

Etant accusée de « mauvais esprit » dans le décret de renvoi, j’ai réclamé à maintes reprises des preuves, des faits précis, circonstanciés. Ils m’ont été systématiquement refusés. On m’a d’abord renvoyée à un « examen de conscience », pour enfin m’écrire que cela relevait de la confidentialité. Je ne vois pas en quoi les sœurs qui se seraient plaintes de mon mauvais esprit auraient pu pâtir de ce qu’on me dise sa concrétisation objective. L’administration d’une bonne justice suppose qu’un accusateur assume son accusation.

A travers cet article, j’ai découvert des charges qui ne m’avaient jamais été formulées auparavant : le fait que j’aurais été reprise par des supérieures sur mon rapport à l’autorité et à l’obéissance, j’aurais monté les sœurs les unes contre les autres, j’aurais critiqué le pape avec virulence, j’agirais dans l’ombre et j’aurais posé des questions trop intimes. Je réfute ces accusations : je n’ai pas manifesté la moindre virulence à l’égard du Pape François, en privé non plus qu’en public. Je révère filialement trop la personne du Saint-Père pour me permettre cela. Toutefois débattre avec passion de sujets où est impliquée la parole du Pape fait partie de la liberté du chrétien, comme l’a souvent dit François, qui a dénoncé à de nombreuses reprises le cléricalisme. Je n’ai eu aucun problème du point de vue de l’obéissance car j’ai toujours obéi exactement, y compris aux supérieures actuellement en charge. Insinuer par ailleurs de l’’emprise, manipulation ou abus spirituels de ma part est grave et exige des preuves qui n’ont pas été établies et qui même ont été formellement refusées aux avocats. Je découvre dans la presse un unique témoignage à ce sujet, qui se couvre encore de l’anonymat tout en osant parler de « viol interne » mais coupe de ce fait toute possibilité de clarification. De même pour la personne qui suggère une action manipulatrice souterraine. Cet anonymat est au moins aussi dissimulé que ce qu’il prétend dénoncer ! Ces accusations ne reposent sur aucun fait objectif, prouvé et contradictoirement débattu, qui permettrait d’établir la véracité et l’effective gravité reprochée. Il s’agit seulement d’affirmations gratuites et anonymes.

Aujourd’hui encore je suis donc réduite à des suppositions sur les motifs de mon renvoi. Il n’y a jamais eu de contradictoire ni d’occasion de défense. La défense ne consiste pas en effet à échanger après la sanction sur les modalités de son exécution (comme ce fut le cas pour moi), mais à présenter des arguments avant la décision, pour établir si les faits reprochés sont constitués et, dans l’affirmative, pour débattre de la sanction la mieux adaptée. Rien de tout cela n’a été fait. Je ne vois d’ailleurs pas ce que désigne les « solutions » qu’on aurait voulu me proposer puisqu’on ne m’a parlé de rien et que j’ignorais qu’il y eût une solution à trouver. Quant aux courriers reçus après ma mise au secret, aucun d’entre eux ne donne place à la défense ni même au dialogue.

Dès lors, n’y a pas eu de « stratégie de défense » puisqu’il n’y a pas même eu occasion de défense au plan canonique. J’ai effectué par la suite un recours et mémoire devant le tribunal de la signature apostolique qui n’a pas eu de suite. Les moyens soulevés étaient d’ordre juridique. Et l’amitié entre le Cardinal Ouellet, Sr M de l’Assomption et Dom Nault est de l’ordre du factuel, de notoriété publique, qui apparaît avec évidence à tous ceux qui fréquentent les DSE. Des tiers l’ont d’ailleurs dénoncé auprès du Nonce apostolique et les témoignages spontanément émis, que j’ai reçus lors de la supplique faite au Pape, ont également fait apparaître cet aspect.

Reste que le Pape François n’a jamais rien signé de sa main en ce qui me concerne et que son nom a pourtant été utilisé. Rien ne permet d’établir avec certitude qu’il a eu connaissance du recours que je lui ai adressé.

Je crois en Dieu, juste et miséricordieux, j’ai confiance en l’Eglise. Je ne doute pas que tôt ou tard vérité et justice seront rétablies, et dans ce but je continuerai à œuvrer par ce que c’est mon devoir de chrétienne et l’exigence de ma fidélité au Christ.

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